Ma cuisine

un spectacle de Sylvain Maurice

Ma cuisine s’adresse à notre mémoire commune. C’est un spectacle où chacun est invité à laisser résonner ses propres souvenirs, ses sensations, ses émotions…

Entretien avec Nicolas Laurent (juin 2021)



Note d'intention
Construit comme le jeu du marabout de ficelle, Ma cuisine se compose d’une série de formes courtes, tantôt des préparations culinaires, tantôt des compositions plastiques créées et filmées en direct, tantôt des assemblages musicaux… C’est un spectacle qui convoque tous les sens et fait dialoguer plusieurs esthétiques : théâtre d’objets, vidéo, textes, musique… et cuisine. Il se conclut d’ailleurs par une dégustation partagée avec les spectateurs d’un plat réalisé pendant la représentation.

Sylvain Maurice s’est inspiré du parcours de Philippe Rodriguez-Jorda, qui est marionnettiste et cuisinier : ainsi a-t-il inventé le personnage de Victor qui, affublé de deux comparses, nous reçoit dans sa cuisine pour composer un spectacle. Tandis que Victor coupe, saupoudre et malaxe, Laurent laisse aller son inspiration musicale et s’empare de la batterie… de cuisine. Nadine, elle, papillonne entre les étagères en quête d’histoires : celles égrenées au fil des cartes postales d’une mamie adorée, celles rapportées par des objets du bout du monde, celles qui s’improvisent au bord d’une assiette avec des pâtes alphabet… Au gré des mots, des sons et des gestes, les saveurs de l’enfance, les souvenirs et les rêves s’invitent entre les trois amis pendant que les recettes mitonnent…

Vidéo(s) >

Générique >

écrit avec les contributions de Nadine Berland, Aurélie Hubeau, Thomas Quillardet, Philippe Rodriguez-Jorda
avec Nadine Berland, Brice Coupey, Laurent Grais
assistanat à la mise en scène Aurélie Hubeau
scénographie Antonin Bouvret
costumes Marie La Rocca
vidéo Loïs Drouglazet en collaboration avec Rémi Rose
lumière Gwendal Malard en collaboration avec Robin Camus
musique originale Laurent Grais
son Clément Decoster
régie générale Rémi Rose

production Théâtre de Sartrouville et des Yvelines – CDN
coproduction TJP Centre dramatique national Strasbourg Grand Est
création en 2018
photos © Elizabeth Carecchio

Dossier de production >

Dossier de production
dosierdediffusion-macuisine_ok.pdf

Revue de presse >

À Sartrouville, Sylvain Maurice mélange cuisine, théâtre d’objets, vidéo, récit de vie et musique pour une recette réussie
Comme pour bon nombre de théâtres situés en Ile-de-France, il n’est guère facile d’arriver en transports en commun au Théâtre de Sartrouville et des Yvelines – Centre dramatique national (CDN). Heureusement, certains soirs de représentations, une navette gratuite (sur réservation) est mise en place depuis Paris, ce qui rend les choses tout de suite beaucoup plus simples. Ce qui fut le cas en ce mardi 11 décembre pour assister à la deuxième soirée du spectacle mis en scène par Sylvain Maurice, Ma cuisine, présenté pour la première fois en public la veille dans ce même théâtre. Une fois arrivé à bon port, grâce à cette navette partie de la place de l’Etoile, le lieu offre un cadre particulièrement accueillant et moderne, avec une salle (la plus petite sur les deux dont dispose le théâtre) très bien équipée tant au niveau des sièges pour le public qu’au niveau du plateau pour les comédiens. Ces derniers, au nombre de trois, sont d’ailleurs déjà installés dans le décor, une cuisine toute équipée, surmontée d’un grand écran vidéo, quand les spectateurs prennent place dans la salle. Sous cet écran qui affiche la phrase « L’odeur et la saveur sont l’édifice du souvenir » comme une sorte de devise, ils s’affairent en cuisine et manipulent différents objets, casseroles et autres ustensiles. Puis la lumière s’éteint et la magie du spectacle peut commencer.
Car il y a vraiment une dimension quasi-magique dans le dispositif scénique imaginé par Sylvain Maurice pour cette cuisine-théâtre (ou théâtre-cuisine). Une caméra vidéo disposée sous le plan de travail permet de projeter en grand sur l’écran qui surplombe la scène les images des ingrédients et des ustensiles manipulés par les trois comédiens. Les premières séquences du spectacle sont sur ce point particulièrement impressionnantes : avec quelques pommes découpées en morceaux, un peu de sucre, et une bonne dose de dextérité, le marionnettiste et manipulateur d’objets Brice Coupey compose une série de tableaux visuels d’une originalité saisissante et empreints d’une certaine poésie. De même, des spaghettis et des petites pâtes en forme de lettres (comme celles avec lesquelles, enfant, on s’amusait à écrire notre prénom sur le rebord de l’assiette de soupe) suffisent à réaliser une sorte de chorégraphie, de ballet de mots et d’images projetés sur l’écran.
Grâce aux textes de cartes postales lues à haute voix par la comédienne Nadine Berland, on comprend vite que le personnage principal, interprété par Brice Coupey, s’appelle Victor, qu’il a hérité de sa grand-mère un don pour la cuisine et qu’il a profité des nombreuses vacances scolaires passées chez elle à Plouha (dans les Côtes-d’Armor) pour perfectionner sa pratique culinaire. À travers l’échange épistolaire entre cette mamie et son petit-fils, c’est aussi tout un pan de nos propres souvenirs d’enfance qui ressurgit au fur et à mesure de la représentation. À ce duo formé par Brice Coupey et Nadine Berland, s’ajoute un troisième compère, en la personne du musicien Laurent Grais, qui compose en direct (et avec une grande virtuosité) la partition sonore du spectacle, avec des instruments classiques (guitare, sanza ou « piano à pouces » venu d’Afrique, etc.) mais aussi des ustensiles de cuisine variés comme des casseroles, des poêles, des couvercles, et même à un moment du spectacle, une ancienne machine à écrire. S’y ajoutent aussi parfois de petites chansons, interprétées notamment par Nadine Berland, qui rappellent les comptines enfantines.
Pour inventer le personnage de Victor, le metteur en scène Sylvain Maurice dit s’être inspiré en partie du parcours de Philippe Rodriguez-Jorda, à la fois marionnettiste, comédien et cuisinier (ce dernier a d’ailleurs collaboré à l’écriture et à la conception de ce spectacle, avec Nadine Berland, Aurélie Hubeau et Thomas Quillardet). Il y a sans doute aussi mis une bonne part de ses souvenirs d’enfance personnels, notamment pour alimenter toute la part de récit de vie que contient ce spectacle. Car, au-delà des performances et des prouesses culinaires, et musicales, du trio de comédiens, se dessinent aussi en filigrane les différentes étapes d’une existence, de l’insouciance de l’enfance aux émois de l’adolescence, en passant par les voyages (au Japon, en Russie, etc.) et les conquêtes amoureuses, qui se soldent parfois par des échecs, des déceptions sentimentales. C’est finalement toute une vie, celle de Victor, rythmée par les cartes postales échangées avec sa mamie, qui s’écoule devant nos yeux, le temps de la représentation.
Les crêpes (délicieuses) confectionnées en direct et partagées avec le public pendant et après le spectacle sont autant de « madeleines de Proust » qui permettent à chacun(e) de replonger dans ses souvenirs d’enfance à travers les odeurs d’orange, de pâte à crêpe chaude, de sucre, de Grand Marnier… Cette dégustation partagée avec les spectateurs permet de rappeler que la cuisine est aussi une affaire de convivialité, qui permet parfois de rapprocher les gens au-delà de leurs différences. Je ne sais pas d’ailleurs si, chaque soir, le plat préparé au cours de la représentation varie, je vous laisse le soin d’aller le découvrir par vous-même, à l’occasion des prochaines dates de ce spectacle culinaire qui a installé ses ustensiles jusqu’au 20 décembre au Théâtre de Sartrouville et des Yvelines, pour le plus grand bonheur des pupilles et des papilles. Cristina Marino – Le Monde / blog L’Arbre aux contes

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