Thyeste

texte Sénèque
mise en scène Sylvain Maurice

C’est Atrée qui chante la prière rituelle
Dans sa bouche hurlante
Ce chant de mort est la prière d’un assassin.

Entretien avec Nicolas Laurent (juin 2021)



Note d'intention
Au début de chaque tragédie de Sénèque, le héros a subi une atteinte terrible, une mutilation affective qui fait de lui une sorte de grand brûlé psychique. Au début de Thyeste, Atrée ressent sa descendance comme illégitime : sa femme a couché avec son frère et il est persuadé que ses enfants sont des bâtards. Son pouvoir est fragilisé, puisque sans avenir, et il est traumatisé par le détournement de sa descendance. Il doit passer à l'acte pour recouvrer ses droits. Ce passage à l'acte est au cœur de la tragédie romaine : le héros humilié commet un crime innommable qui transgresse les lois de l'humanité. Il élabore une sorte "d'anti-morale", il donne du sens à l'horreur pour marquer à jamais la mémoire, pour qu'on se souvienne éternellement de son acte. Il arrête le Temps, pervertit l'ordre du monde et fait fuir les Dieux. Il accède, par la violence, à un statut qui redonne une valeur à son nom : Atrée s'inscrit ainsi en fondateur avec Tantale de la lignée des Atrides, de funeste mémoire.

Sénèque écrit un théâtre qui met en scène des "monstres". Ils nous font certainement horreur, mais ils nous fascinent. Cette ambivalence est un moteur puissant pour le spectateur : on consent à assister au spectacle de la cruauté pour mieux la mettre à distance et peut-être en rire. Shakespeare qui est un excellent lecteur de Sénèque l'a très bien compris, qu'on songe à Titus Andronicus...
Cette "mise à sac" du "sacré" nous interroge tous. Elle est la question centrale de ce théâtre : la barbarie est dans l'homme, et il convient pour la juguler de bien la connaître. Le théâtre peut être le moyen de cette connaissance. C'est le sens que je souhaite donner à cette mise en scène. Sylvain Maurice

Générique >

avec Nadine Berland, Marc Berman, Jörn Cambreleng, Philippe Girard, Boris Napès, Désirée Olmi, Michel Quidu
musique Laurent Grais (percussions)
traduction Florence Dupont
scénographie Renaud de Fontainieu
costumes Cidalia da Costa
lumière Philippe Lacombe
maquillages Sophie Niesseron
perruques Sophie Niesseron

production L'Ultime and Co / coproduction Théâtre de Gennevilliers
création en 1999
photos © Éric Derval

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